Un vieil homme, avec une longue barbe blanche et un habit rouge, passant par la cheminée, une nuit de décembre, pour déposer cadeaux et friandises dans les souliers des enfants… Selon l’endroit où vous vivez et les traditions familiales, vous me répondrez soit qu’il s’agit de saint Nicolas, soit que je parle du Père Noël.
Il est vrai que les deux bonshommes ont pas mal de points communs ! Mais, les américains n’appellent-ils pas Papa Noël « Santa Claus » ?
De saint Nicolas au Père Noël
Père Noël serait en réalité une version « déformée » du saint Nicolas présent en Europe (Europe du Nord, centrale et de l’Est). Les immigrés hollandais auraient introduit aux États-Unis la tradition de leur pays d’origine. « Sinter Klaas » serait alors devenu « Santa Claus » et se serait laïcisé, troquant la crosse et la mitre contre un bonnet et un sucre d’orge.
Particularités régionales
La figure de Saint-Nicolas elle-même comporte des différences d’une région à l’autre. Depuis le XVIe siècle, on le représente souvent accompagné de Père Fouettard, ou de plusieurs Pères Fouettards, dont les dénominations (« Zwarte Piet », « Hans Trapp »…) et le rôle sont variables. Il est aussi, à certains endroits, accompagné de diables appelés « Krampus », ou de « Schabs », qui battent la mesure et marchent en faisant claquer leurs fouets pour chasser les démons de l’hiver.
Concernant son moyen de transport, si la majorité s’accorde à dire qu’il se déplace sur un âne ou un cheval blanc, d’autres (aux Pays-Bas) le font naviguer sur un bateau à vapeur, alors qu’en Allemagne, on le représente aussi sur une luge.
Rien de surprenant, donc, à ce que les américains aient donné au grand saint d’autres attributs que ceux que nous lui connaissons. Il voyage ainsi sur un traineau et est assisté de lutins. Plusieurs pays se disputent aussi l’honneur d’abriter le vieil homme (Suède, Norvège, Sibérie, Laponie ou Pôle Nord). Car, bien sûr, il ne descendra plus du ciel, qui marquait trop l’aspect chrétien.
Laïcisation
Il y a en effet laïcisation du personnage. Mais la suppression du caractère religieux de l’homme en rouge n’a pas lieu qu’aux États-Unis. L’Europe elle-même a entrepris ce transfert. Lors de la Réforme (XVIe siècle), les protestants repoussant le culte des saints, les cadeaux sont attribués à l’Enfant Jésus (le « Christkind »). C’est le cas en Allemagne, mais aussi en France.
En Allemagne, sous l’influence des souverains allemands du XVIIIe siècle et des courants romantique et nationaliste du XIXe, les figures chrétiennes sont remplacées par d’anciens symboles germaniques. C’est le grand retour des elfes et des fées.
Le personnage – celui du Père Noël mais sans doute déjà celui de saint Nicolas – serait aussi inspiré du dieu viking Odin, de Julenisse (lutin nordique) et du dieu celte Gargan. Julenisse et Odin apportaient déjà des cadeaux aux enfants. On trouve aussi des ressemblances au niveau de l’habillement.
Le solstice d’hiver
Cette laïcisation n’est, en fin de compte, que le chemin inverse à celui qui avait été parcouru bien des années auparavant. Les célébrations païennes autour du passage du solstice d’hiver étaient en effet bien présentes, avant même la naissance de Jésus. L’Église catholique, voulant faire disparaître ces croyances et traditions païennes, a modifié beaucoup des fêtes païennes en célébrations religieuses. Ainsi, en 354, le Pape Libère fixe la naissance de Jésus au 25 décembre, instaurant une fête de Noël purement religieuse.
C’est en ce même IVe siècle que vécu Saint Nicolas de Myre, qui marque les esprits par sa générosité et par les miracles qui lui sont attribués. Les faits historiques, mais aussi les légendes touchant ce personnage hors du commun vont l’ériger en protecteur des petits. Son culte se répand à la fin du XIe siècle. C’est à la date de sa mort, le 6 décembre, qu’un personnage, habillé comme on pense que le saint pouvait l’être, offre des présents aux enfants en sa mémoire.
La figure laïque du Père Noël a en réalité toujours le même rôle : la célébration du retour annoncé du printemps. N’est-il pas appelé, dans plusieurs pays, « Grand-Père Hiver », « Grand-père Neige » ou « Grand-Père Gel » ? Voilà de quoi nous rappeler la tradition des grands feux où la population brûle le « bonhomme hiver » pour faire revenir le printemps.

Influences littéraires
La tradition américaine a largement été marquée par les textes littéraires et leurs illustrations. À commencer par le livre A New-year’s present, to the little ones from five to twelve, paru en 1821, qui contient le poème Old Santeclaus. Il décrit un vieil homme qui apporte des cadeaux aux enfants sur un traineau tiré par un renne.
En 1823 paraît, dans un journal new-yorkais, le poème A visit from St Nicholas, connu aussi sous le nom The night before Christmas. Il raconte la venue de Saint Nicolas, lutin dodu et souriant qui descend du ciel dans un traineau volant tiré par des rennes et distribue des cadeaux aux enfants dans la nuit de Noël.
L’imagerie de Santa Claus varie ensuite au gré des illustrations et des nouvelles histoires, qui paraissent chaque année dans les journaux.
Au Royaume-Uni, où « Father Christmas » s’impose vers 1850, soulignons le rôle de Charles Dickens et de ses histoires de Noël.
En France, la prépondérance du Père Noël sur Saint Nicolas ne survient qu’après la seconde guerre mondiale. La séduisante Amérique bénéficie alors, après la libération, d’une aura particulière.
Le personnage a, depuis, trouvé une place de choix dans le folklore, la littérature et les arts visuels, même si la tradition de saint Nicolas reste encore bien vivace dans plusieurs régions.
Sources : www.lefigaro.fr, www.rtl.be, missel.free.fr, fr.wikipedia.org